Numéro 2 - Printemps 2015
Querelles littéraires et disputes politiques : Italie et Espagne XIIIe - XVIIe siècles
08. Défense et censure d’un jésuite de cour : la controverse autour du Père Jerónimo de Florencia -
Florencia prédicateur royal controverse image jésuites
Sarah Voinier
Université d'Artois
Textes et Cultures EA 4028
p.191-210.
Sarah VOINIER, « Défense et censure d’un jésuite de cour : la controverse autour du Père Jerónimo de Florencia ».
Résumé. Les représentations du jésuite Jerónimo de Florencia ont toujours été un enjeu dans la construction de l’image de la Compagnie du XVIIe siècle à nos jours. La Carta de defunción du Père jésuite Juan de Montalvo, rédigée en 1633, au lendemain de la mort du prédicateur royal montre comment le discours posthume, véritable projet hagiographique, réhabilite cette figure controversée dont l’influence politique à la cour fut grandissante jusqu’à la mort de Philippe III. Les termes de l’éloge dépassent l’excellence de ses qualités pour souligner son désintéressement ainsi que sa parfaite obéissance à l’ordre et à sa mission évangélique. En creux, se dessine une défense à un double niveau, à la fois individuel et collectif, dans un contexte où l’antijésuitisme fait des émules en Espagne. À l’inverse, trois siècles plus tard, le jésuite Antonio Astrain, dans son Historia de la Compañía, fait un tout autre choix, celui de dénoncer les vices du Père Florencia pour mieux réaffirmer les valeurs spirituelles et morales de la Compagnie. De la louange à la vitupération, la variation des images de Jerónimo de Florencia prouve la plasticité des arguments de défense de la Compagnie mais aussi sa nécessité dans une Espagne inégalement acquise à sa cause.
Mots-clés. Florencia, prédicateur royal, controverse, image, jésuites.
Sarah VOINIER, « Défense et censure d’un jésuite de cour : la controverse autour du Père Jerónimo de Florencia ».
Resumen. Las representaciones del jesuita Jerónimo de Florencia siempre estuvieron en juego en la construcción de la imagen de la Compañía desde el siglo XVII hasta nuestros días. La Carta de defunción del Padre jesuita Juan de Montalvo, redactada en 1633, después de la muerte del predicador real, muestra cómo el discurso póstumo, verdadero proyecto hagiográfico, rehabilita este personaje controvertido cuya influencia política en la corte fue creciente hasta la muerte de Felipe III. Los términos del elogio van más allá de la excelencia de sus cualidades para subrayar su desinterés así como su perfecta obediencia a la orden y a su misión evangélica. De forma implícita, se dibuja una defensa a un doble nivel, a la vez individual y colectivo, en un contexto en el que el antijesuitismo llega a convencer en España. Al contrario, tres siglos más tarde, el jesuita Antonio Astrain, en su Historia de la Compañía, procede de manera muy distinta al denunciar los vicios del Padre Florencia para mejor reafirmar los valores espirituales y morales de la Compañía. De la alabanza a la vituperación, la variación de las imágenes de Jerónimo de Florencia demuestra la plasticidad de los argumentos en defensa de la Compañía pero también su necesidad en una España parcialmente adquirida a su causa.
Palabras clave. Florencia, predicador real, controversia, imagen, jesuitas.
Sarah VOINIER, « Défense et censure d’un jésuite de cour : la controverse autour du Père Jerónimo de Florencia ».
Abstract. The representations of the Jesuit Jerónimo de Florencia have always been an important stake in the construction of the Company’s image from the 17th century until today. The Carta de defunción written in 1633 by the Jesuit Father Juan de Montalvo immediately after the death of the royal preacher shows how the posthumous discourse —a truly hagiographical project —rehabilitates this controversial figure, who exerted more and more political influence in the court until the death of Philip III. The eulogy goes beyond the man’s excellent qualities to emphasize his selflessness as well as his utter obedience to the order and to his evangelical mission. Indirectly there emerges a defence at two levels, both individual and collective, at a time when Anti-Jesuitism was spreading in Spain. Conversely, three centuries later the Jesuit Antonio Astrain made a radically different choice in his Historia de la Compañía as he denounced Father Florencia’s vices to better reaffirm the Company’s moral and spiritual values. The varying images of Jerónimo de Florencia, which go from praise to vituperation, show how malleable the Company’s defending arguments are but also how necessary they are in Spain, a country where support for the Company is uneven.
Keywords. Florencia, prédicateur royal, controverse, image, jésuites.